Régimes détox : pas mal d’esbroufe et peu de science

Publié le 20/05/2015

Imprégné de religiosité, le souci de « purification » vient du fond des temps. Particulièrement vif aujourd’hui pour ce qui concerne le corps, il est attisé, entre autres marchands du temple, par les industriels de la « détoxification ». Nous devrions à tout prix nous débarrasser d’innombrables « toxines », et autant de produits et de régimes sont là pour nous y aider. Seul détail : il y a très peu de données scientifiques qui justifient leur utilisation. Aucune étude solide ne permet d’évaluer leur efficacité. Et ils ne sont pas toujours sans risques, en particulier lorsqu’ils prétendent aussi nous aider à perdre de poids…

Faire la chasse aux « toxines » est commercialement très habile. Qui ne souhaiterait se défaire de toutes ces substances indésirables, plus ou moins dangereuses, plus ou moins identifiées, dont la liste est aussi floue qu’interminable ? La médecine connaît des toxiques comme l’alcool, le tabac, les drogues. L’industrie du détox élargit la palette à l’infini : les produits chimiques de toutes sortes, les polluants de l’environnement, les métaux lourds, les aliments transformés, et finalement tous les produits de la vie moderne réputés dangereux à tort ou à raison…


Le corps humain sait se défendre

Pour l’immense majorité des polluants désignés à la vindicte, c’est la dose qui fait le poison. Et cette dose est de plus en plus contrôlée et diminuée à l’initiative des autorités sanitaires. Les seuils admissibles ne sont pas toujours atteints. Et quand ils le sont, observent les experts de l’OMS, on est loin d’avoir la certitude qu’ils peuvent affecter significativement la santé humaine.
Le corps humain développe de son côté des mécanismes sophistiqués pour éliminer les toxines. Le foie, les reins, le système gastro-intestinal, la peau et les poumons jouent un rôle dans l’excrétion des substances indésirables. Les régimes détox commerciaux identifient rarement les toxines spécifiques qu’ils veulent supprimer ou les mécanismes par lesquels ils les éliminent. Ce qui rend leurs allégations difficiles à vérifier. Les rares études publiées sont de petite taille et souffrent de lacunes méthodologiques qui leur ôtent beaucoup de crédibilité.

Quelques données chez l’animal, et pas de preuve d’efficacité chez l’homme
Que sait-on en réalité ? Il existe des données préliminaires chez l’animal de laboratoire. La coriandre diminue l’accumulation du cadmium chez la souris. Les acides malique, succinique et citrique facilitent aussi l’élimination de l’aluminium chez la souris. Mais chez l’homme, des apports adéquats de fer, de calcium et de magnésium sont la meilleure protection ! Toujours chez les animaux, une algue verte (Chlorella) facilité l’élimination du mercure et de certains polluants organiques persistants. Un substitut des graisses non digestible (Olestra) paraît aussi prometteur contre ces polluants. Les recherches se poursuivent, mais nous sommes encore loin du remède miracle.

Des pratiques nutritionnellement dangereuses

Ce qui n’empêche que se multiplient les jeûnes, les régimes de famine, les recours aux laxatifs, diurétiques, suppléments vitaminiques et minéraux et autres produits « nettoyants » ! Alors qu’aucune étude menée chez l’homme ne permet d’évaluer l’efficacité du détox. Ni contre les fameuses toxines, ni d’ailleurs contre l’excès de poids (souvent annoncé). Les régimes amaigrissants quels qu’ils soient, ont un taux de succès de seulement 20 %. Les allégations des régimes détox vis-à-vis du poids ne reposent sur aucune preuve clinique. Pire, nombre d’entre eux prônent des apports nutritionnels bien inférieurs aux recommandations. Par exemple, des apports de protéines qui conviendraient tout juste à un sujet de 23 kg ! Les utilisateurs sont prévenus que la fatigue, les migraines, les insomnies, l‘anxiété, les tremblements font partie du régime. Mais plutôt qu’au manque d’énergie et de protéines, les charlatans les attribuent aux « mauvaises substances qui quittent le corps » ! On risque tout simplement la dénutrition. Et au minimum, à plus ou moins long terme, l’abandon du régime et le retour au poids antérieur, voire une prise de poids supplémentaire. Or il existe des prises en charge de l’excès de poids qui comportent des apports adéquats de protéines et de micronutriments.

La détoxification comporte aussi d’autres risques, comme le surdosage de suppléments, de diurétiques, de laxatifs et même d’eau ! L’absence de réglementation est un problème majeur. Et quand le « détox » est dénoncé en tant que tel, les marchands rivalisent d’inventivité pour trouver, pour la même pacotille, d’autres termes qui le remplacent, avec l’idée de nettoyage, de purification, etc…
Tout cela pour vendre des produits chers, aux allégations non fondées et aux risques potentiels pour la santé. Le détox a un rapport avec le péché, la contamination, la culpabilité, et bien sûr la rédemption. Des notions profondément enracinées dans l’histoire religieuse er la psychologie humaine. Pour certains, adopter une alimentation équilibrée a peut-être moins d’attrait que vouloir éliminer les mauvaises toxines. Mais c’est pourtant plus efficace !



Source : Nutrinews / Cerin (Mai2015)

Klein AV, et coll. J Hum Nutr Diet 2015 ; DOI : 10.1111/jhn.12286. 

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